L’INDEX
Visible à de très nombreuses reprises à travers ce film, le doigt pointé vers quelque chose revêt deux significations principales antagonistes. Voir la fiche “L’index” en téléchargement ci-après.
- le doigt accusateur
Symbole d’autorité, il représente l’adulte. Il est brandi par de nombreux adultes à travers le film, souvent pour manifester leur colère envers un enfant, pour menacer ou condamner. C’est aussi ce doigt qui appuie sur un bouton pour supprimer un personnage gênant en ouvrant une trappe sous son siège : c’est bien le doigt du pouvoir.
- le doigt monstratif
Il montre généralement un espace à explorer. Ce sont les enfants qui l’utilisent le plus fréquemment ici. Ce doigt pointé vers l’inconnu symbolise alors la liberté. Celle-ci n’est permise que dans un monde sans adulte. Le groupe d’enfants, littéralement libéré des griffes des adultes en s’envolant grâce au dirigeable, vogue à l’envi vers sa liberté :
« Mes amis, on va prendre deux ans de vacances ! » « Sans école ! » « Sans parent ! » « Sans violon ! »
- le doigt tendu
La République socialiste tchécoslovaque (1948-1990) fait partie du bloc soviétique. Le régime est plutôt liberticide jusqu’au cœur des années 1960. À cette époque, des dissidents (dont de nombreux artistes, écrivains et intellectuels) commencent à dénoncer les abus du régime, en particulier la censure de la presse. Les contestations se font plus vives en 1967. Avec ce film réalisé en 1966, comment ne pas voir la symbolique du doigt tendu de Karel Zeman au gouvernement : le peuple (les enfants) cherchant par tous les moyens à se libérer en échappant aux intransigeances du pouvoir (les adultes)…
La situation débouchera sur le fameux Printemps de Prague en 1968 (5 janvier au 21 août) : le réformateur Alexander Dubček qui arrive alors au pouvoir prône un « socialisme à visage humain » en axant la politique vers une voie plus démocratique, introduisant la liberté de la presse, d’expression et de circulation. Le 21 août 1968, les troupes du Pacte de Varsovie envahiront le pays pour mettre fin au printemps de Prague.
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AUTORITÉ / LIBERTÉ
L’une des aspirations essentielles sous-tendant Le dirigeable volé réside donc dans le fait de montrer l’antagonisme entre l’autorité exercée par le pouvoir et la soif de liberté véhiculée par ceux sur qui s’exerce cette autorité. Plusieurs autres éléments reviennent de manière fortement récurrente pour symboliser cette dialectique autorité / liberté :
- Les oiseaux
Toutes sortes d’oiseaux volent, planent dans le ciel à de nombreuses reprises. Outre le symbole évident de liberté absolue, ils font aussi généralement un lien plastique entre la prise de vue réelle et l’animation puisqu’il n’est pas rare de voir le filmage d’un oiseau dessiné qui devient réel au plan suivant (et vice-versa).
- Les moyens de transport
L’accumulation des divers moyens de transport qui jonchent le film, des plus communs aux plus fous, sont un clin d’œil au progrès scientifique mais surtout une démonstration ludique de l’envie d’aller ailleurs, par voie terrestre, aérienne ou sous-marine, sans barrière…
- Les obstacles
Le nombre impressionnant d’obstacles, de barrières justement, de passages secrets franchis au nez et à la barbe du pouvoir : il s’agit bien de l’individu défiant l’autorité.